Cuisines

[montagnes de Firin]

Plusieurs jours avaient passé depuis le départ d'Alec pour Anfauglith. Déguisé en serviteur, il avait réussi à se faire embaucher par un petit noble qui n'y avait vu que du feu.
Le Prince était conscient que son aura était repérable à trois kilomètres à la ronde, aussi, s'était-il muni d'un bracelet qu'utilisaient les espions atalantea pour masquer leur aura.
Il devait avoué qu'il était épuisé, la route qu'il avait parcouru, le temps qu'il lui avait fallu pour convaincre ce *+$#% de nobliau pour l'embaucher et l' âpre discussion pour convaincre Kane de rester en retrait l'avaient vidé de ses forces.
C'est donc avec un immense soulagement que l'atalantea arriva au palais.
Après avoir délaissé son "maître" il se dirigea d'un bon pas vers les cuisines. Heureusement pour lui, la salle était vide; il put donc s'asseoir et accessoirement enlever le chapeau sous lequel il avait caché ses cheveux en les attachant.

Alec profita également du fait qu'il n'y ai personne pour se servir de l'eau et étancher la soif qui le taraudait depuis plusieurs heures.

-" Et maintenant il faut que je trouve Leyna ... autant dire chercher une aiguille dans une botte de foin "

"Mais non voyons, regarde c'est tellement facile que tu n'as pas eu besoin de chercher !"

Appuyée contre l'embrasure de la porte, elle avait un petit sourire. Comme elle était contente de le revoir ! Après dix-sept ans ! Elle le détailla, et remarqua qu'il était habillé comme un serviteur. Elle éclata de rire.

"Ca alors, si j'imaginais te trouver dans cette tenue !" xD

Elle se reprit et s'approcha de son ancien ami.

"Tu as soif on dirait ?"

Elle lui servit une grande coupe d'eau et s'intalla en face de lui.

"Nous avons le temps, la cuisinière est malade et c'est moi qui cuisine en ce moment. Comment tu vas ? Eléa est arrivée il y a quelques minutes, tu veux la voir ?" ^^

Sans attendre la réponse elle se leva et alla chercher une bassine qu'elle remplit d'eau. Elle la posa entre le Prince et elle, y jeta une poudre qu'elle qualifia de "magique" et récita une formule où apparaissait le nom d' "Eléa".

"Regarde..."

La surface de l'eau se troubla, puis une image tourbillonna avant de devenir nette. On pouvait y voir la jeune Reine en compagnie du Gouverneur de Fìrimar. On pouvait également entendre ce qui se disait.

« Ma pauvre petite ambassadrice ! Vous voilà dans une situation assez cauchemardesque. Vous ne vous vous souvenez absolument de rien ? »

La scène qui suivit, Leyna ne s'y attendait pas. Comment osait-il ? Eléa n'était-elle pas une amie pour Arkam ? Elle ne comprenait pas vraiment pourquoi il faisait ça, en tout cas, il devait avoir une excellente raison. On n'entendit pas ce que la Reine murmura au Prince. Leyna claqua des doigts et l'image se brouilla et tourbillonna de nouveau. L'écran redevint de l'eau. Elle leva la tête vers son ami, inquiète de la réaction qu'il pourrait avoir.

Alec sourit en apercevant Leyna. Il fit semblant de bouder lorsqu'elle rit de sa tenue et eut un sourire amusé lorsqu'il constata qu'elle était toujours aussi spontanée.
L 'atalantea n'ayant pas eut le temps de répondre à la question, il se contenta d'afficher un sourire et de lever les yeux au ciel lorsque la jeune femme revint avec une bassine d'eau.

Sa curiosité piquée au vif, Alec regarda avec intérêt Leyna verser une poudre dans l'eau et réciter une formule à voix basse.
Eléa était assise avec Arkam, ils parlaient et puis tout d'un coup ....
Leyna s'empressa de faire disparaître la scène.

Le Prince ténébreux se leva d'un bond, son sang d'atalantea bouillait dans ses veines et ses yeux brillaient d'une rage loin d'être contenue.
La personne qui se trouvait devant Leyna était bien loin du Alec que tous connaissaient, il n'était dans cet état que sur les champs de batailles et encore ....
Arkam avait intérêt à avoir une bonne, très bonne raison.

-" Je vais le ...." Alec se dirigea vers la porte, les poings serrés.

Leyna eut le temps de soupirer, mais beaucoup moins le temps de réfléchir.

"Je vais le..."

La jeune femme se leva à son tour, prenant le risque de se poster devant son ami.

"Non, tu ne vas rien faire du tout ! Pense que si Eléa te voit être violent, elle ne voudra plus t'approcher et tout sera perdu !"

Elle marqua une pause, observant Alec, essayant de deviner s'il se calmait.

"S'il te plaît, calme-toi, tu règleras tes comptes avec Arkam plus tard, pour l'instant pense à Eléa."

Elle n'avait pas peur d'Alec, elle s'inquiétait de la suite, comment cela se passerait-il s'il combattait son frère ? Certes, Arkam n'avait pas à faire ça, mais Alec n'était pas censé voir cette scène, il n'était même pas censé être ici.

"Assieds-toi, parlons un peu, on a pas mal de choses à se dire. Et puis il faut aider Eléa, lui faire retrouver la mémoire. Et puis il faut que je te parle de ton fils." ^^

Elle espérait que tout cela le calmerait, elle comptait beaucoup sur la Reine pour contenir cet élan de jalousie de la part du Prince.

Ça lui faisait mal de l'admettre mais Leyna avait raison: s'il se montrait ainsi devant Eléa, la sen'yo ne voudrait plus jamais le revoir.

Alec regarda la jeune femme dans les yeux et n'y vit nulle trace de peur. Avec un soupirs résigné, le Prince atalantea ferma ses yeux et se calma petit à petit. Leyna n'avait rien à craindre de lui et de toute façon, il aurait été incapable de lui faire le moindre mal ....
C'est ce moment que choisi Kane pour intervenir:

-* Allez gamin la p'tite dame a raison. Assied-toi et calme-toi. Je crois que ce qu'elle a à nous raconter promet d'être intéressant...*

L'effet sur Alec fut automatique: l'aura de tranquillité dégagé par le dragon le calma instentanément et fit disparaître de son esprit les dernières traces de colère.

-" Très bien Leyna je t'écoute. Je dois dire que je suis assez curieux de savoir ce que devient mon fils." dit-il en s'asseyant en face de la jeune femme.

Leyna poussa un soupir soulagé, remerciant silencieusement ce qui lui avait fait changé d'avis.

"Ton fils..." fit-elle en laissant échapper une second soupir accompagné d'un sourire.

Elle avait vraiment eu peur qu'il se montre à Eléa trop tôt. Ca aurait pu tout gâcher et ainsi détruire les derniers espoirs qu'elle accordait à la Prophétie.

"Il a beaucoup hérité de ses parents. Il est très beau et plaît beaucoup aux filles ! Mais il n'est intéressé que par sa passion : défendre. Il se bat à merveille et a fait éclat auprès de la famille royale älva en défendant une jeune fille de la cour. Depuis il est entré au service du Roi en tant que chevalier à à peine dix-sept ans, ce qui est assez rare. Il est très rêveur, comme sa mère. Aïna l'a suivi à Samaeria, ils vivent ensemble, elle est là pour lui remettre les pieds sur terre. Elle est comme moi assez terre-à-terre."

Plus elle parlait, plus son regard partait au loin. Cela faisait plusieurs mois qu'elle n'avait pas vu ses enfants.

"Ils sont très proches tous les deux, comme s'ils étaient jumeaux, c'est dingue !" fit-elle avec un petit rire. "J'essayerai de les faire venir tous les deux un de ces quatre, tu pourrais voir ton fils et Arkam pourrait voir sa fille..."

Elle continua de lui parler encore de Dulin pendant un moment, puis, décidant de changer de sujet, préféra revenir à ce pourquoi ils se voyaient aujourd'hui.

"Parlons un peu d'Eléa tu veux ? Il faut absolument qu'elle se souvienne. Il faut que tu m'aides à savoir ce qui lui bloque la mémoire. Je n'ai pas le temps en ce moment, j'ai tout un tas de choses à faire, je ne peux pas discuter avec elle en essayant de lui soutirer des informations. Toi tu peux, je suis sûre qu'elle te fera rapidement confiance. Vu comme elle m'a regardé la première fois qu'on s'est vue, elle aura naturellement confiance en toi."

-"Pardon ? Tu veux que je quoi ?"

Nan c'était une mauvaise blague n'est-ce pas ? Leyna n'espérait pas sérieusement qu' Alec essaie de se rapprocher de nouveau d'eléa tout en sachant qu'elle ne se souvenait pas de lui ... bon ok, la jeune femme était sérieuse.

-" Et comment veux-tu que je fasse pour l'approcher ? J'ai ça d'accord ..." dit-il tout en désignant le bracelet attaché à son poignet, " ... mais pour mon apparence ? Tout le monde me connaît à la cour, sans compter Ark qui peut lire dans les pensées des gens. Puis je me vois vraiment, mais alors vraiment pas entrer dans la salle comme ça après tant d'années d'abscences."

L'atalantea imaginait déjà la scène: "Bonjour tout le monde je sais bien que je me suis conduit comme le pire des laches ces dernières années mais là je dois parler avec la demoiselle sen'yo. Alors je vous l'emprunte deux secondes !" Nan sérieusement, il n'avait aucune envie, et ce malgré les pulsions suicidaires qui l'animaient régulièrement ces depuis 17 ans, de finir en tas de cendres ...

"Je veux que tu ailles la voir !" dit-elle avec son plus beau sourire.

Elle se leva, il fallait qu'elle commence à préparer certaines choses pour ce soir, même si beaucoup de plats avaient été préparé à l'avance, il y en avait qui devait être fait à la dernière minute. Elle passa un tablier et se lava les mains. Elle réfléchit à toute vitesse et commença à préparer un plat quelconque tout en exposant son plan à Alec.

"Tu n'es pas obligé de te rendre à la fête, quoique ça serait mille fois plus simple. J'ai ma petite idée là-dessus. Je peux très bien lui proposer de prendre l'air et, très délicatement je l'admets, la planter là, et, comme par miracle, tu seras là, prêt à philosopher au clair de Nimilith !" ^^

Elle plaça les petits fours sur un plateau, de sorte à en mettre le plus possible dessus.

"Tu resteras dehors comme ça ! Il faudra que tu te renseigne sur elle, sur son passé, sur ce qui a pu lui arriver juste après son effacement de la mémoire. Il faut qu'elle te fasse confiance, qu'elle ait envie de te revoir aussi. Tu vas passer beaucoup de temps avec elle pour savoir ce qui lui est arrivé, et comment elle pourrait retrouver la mémoire. Il faut que tu 'observes, voir s'il n'y a rien d'étrange en elle. Moi je me chargerais de faire des recherches sur ce que tu me diras."

Elle se lava à nouveau les mains et commença à arranger une coupe de fruit.

"Si tu veux changer d'apparence, je peux te trouver une formule ou quoi, sinon, il te faudra une tenue plus présentable que celle-là, je peux t'en trouver une, à moins qui tu aies des affaires de rechange, il ne faudra pas lui mentir à elle, sinon elle risquerai de perdre la confiance qu'elle aura acquis auprès de toi. Si tu ne veux pas qu'Arkam soit au courant, fais en sorte qu'elle soit dans une sorte de confidence, un petit secret échangé. Dis-lui qui tu es aussi."

Elle arrêta de travailler pour lever les yeux sur Alec.

"N'oublie pas... C'est la Reine des sen'yos, elle est ici en tant que pseudo-ambassadrice, et elle ne te connait pas ! N'oublie surtout pas ce dernier point, ce n'est plus ton Eléa, autrement dit, retour aux vouvoiements, etc..."

Elle lui fit un sourire. Elle savait bien qu'il ferait attention à tout ça, mais elle avait besoin que tout se passe parfaitement bien. C'était son rôle d'amie de le mettre en garde.

"Allez, dépêche-toi d'aller te préparer. Je dois commencer à mettre les plats en place, me changer et aider Eléa à s'habiller."

Et c'est ainsi que le prince Atalantea, passablement choqué, se fît mettre à la porte de la cuisine par une Leyna encore plus déterminée que d'habitude. Il lui fallut au moins bien cinq minutes avant de réaliser ce qui venait de se passer: il venait, une fois n'est pas coutume, de se laisser embarquer dans un projet rocambolesque concocté par son amie. Alec en aurait presque pleuré, il se souvenait de la difficulté qu'il avait éprouvé à avouer ses sentiments à Eléa quelques années plus tôt; et maintenant il fallait qu'il gagne de nouveau sa confiance ?

Il soupira. De toute façon, ce n'était pas comme s'il avait vraiment eut le choix: il découvrirait la raison pour laquelle la reine Sen'yo avait perdu la mémoire, coûte que coûte.

-" Il faudrait déjà que tu ailles te changer gamin ... parce que là, tu ressemble pas à grand chose."

Le reptile volant avait toujours eut le don d'intervenir au mauvais moment, et il avait, au plus grand désespoir du prince, souvent raison. C'est donc un Alec un chouilla dérouté qui parti en quête d'un endroit où se changer.

[direction les jardins]

[Windë- palais impérial]

Le calme régnait pour une fois dans les cuisines du palais d'Anfauglith et ce pour l'unique raison que personne ne s'y trouvait. Mais cette quiétude somme toute relative fût brisée par l' arrivée en trombe d'un loup noir complètement paniqué, qui, après quelques secondes d'observation ne trouva rien de mieux que de se cacher dans une énorme jarre de farine au format industriel. Peu après entrèrent plusieurs gardes qui cherchèrent en vain l'intrus quadrupède qui avait osé s'introduire dans leur château et ainsi percé leur solides défenses.

Claire, car le loup n'était autre que l'impératrice nagaeru, cachée dans sa jarre commençait à se demander si venir ici sous cette forme et sans s'annoncer était, en fin de compte, une aussi bonne idée.
Il fallait pour cela revenir quelques heures en arrière ...

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Claire et Opale s'étaient posées dans un champ un peu à l'écart de la cité d'Anfauglith. Là, l'Impératrice avait décidé d'infiltrer la cité, puis le palais sous sa forme lupine qui était, selon elle, beaucoup plus discrète que sa forme humanoïde ou sa forme féline.
Entrée dans la citée ne fût pas compliqué et même si Opale de retour sous sa forme de renardeau avait failli se perdre en restant à baver devant l'étal rempli de framboises d'un marchand, elles étaient arrivées sans encombre au palais.
Et c'était là que tout avait commencé à virer au vinaigre: les gardes les avaient repéré, ils l'avaient pourchasser dans tout le château et comble du comble, elle avait perdu Opale et se retrouvait contrainte de fuir et de chercher un refuge le temps que l'orage passe.

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Et c'était ainsi qu'elle se retrouvait là, dans cette jarre à prier mère Nature que ces fichus gardes ne la découvre pas.

Quelques secondes plus tard, Leyna arrivait les bras chargés de linge sale. Elle repéra les gardes et, déjà passablement énervée, leur cria dessus.

"Qu'est-ce que vous faites là ? Vous croyez vraiment qu'un meurtrier se cache dans la cuisine ? Pour m'assassiner peut-être ? Aidez-moi à poser ce linge et sortez de ma cuisine !" >o<

Deux minutes plus tard, la cuisine était vidée de ses occupants et la jeune femme se laissa aller sur le banc. Elle était fatiguée, ses nuits étaient courtes entre le coucher tardif d'Eléa et Arkam qui préférait se lever tôt.
Elle posa sa tête sur ses bras et commença à glisser doucement dans les bras de Morphée.
Elle ressentait au loin la présence de son amie Impératrice, mais elle n'y avait pas fait attention, n'ayant reçu aucune lettre la prévenant de son arrivée.

La joie et le soulagement que ressenti Claire en entendant Leyna entrer dans la cuisine et crier sur les gardes furent indescriptibles. Sauvée, elle était sauvée !
La louve décida tout de même d'attendre que le calme plat soit revenu dans la cuisine avant de sortir de sa cachette improvisée. Mais ce que l'Impératrice n'avait pas prévu c'est qu'elle resterait coincée dans la jarre de farine.

- Eu ..... au secours ? Oo"

Le quadrupède commença donc à se débattre avec ferveur à grand renfort de jappements et de couinements, provoquant ainsi le basculement de plus en plus fort de la jarre qui menaçait de se fracasser au sol à tout moment.

- Mais tu vas tomber oui !!!! >w<"

Le voeux de Claire ne tarda pas à se réaliser et le réceptacle en terre cuite se fracassa sur le sol en répandant un nuage blanc et poudreux dans toute la pièce. Une fois ce nuage dissipé, on pouvait voir une louve désormais blanche au milieu d'un chaos farineux censé être une cuisine.

- *Eh eh ... Salut Leyna* ^^"

Leyna fut réveillée en sursaut par un bruit tonitruant. Une jarre de farine avait éclaté, sans aucune raison valable. Le temps pour la jeune femme de se remettre les idées en place qu'elle entendit résonner dans son esprit une voix qu'elle connaissait bien.

"Claire ?!"

Elle se leva et découvrit une louve... Blanche ? Elle fit rapidement l'association entre les gardes dans sa cuisine, la jarre brisée et la blancheur d'une louve originellement noire.

"Mais... Qu'est-ce que... ?"

Elle ne put terminer sa phrase, elle partit dans un fou rire incontrôlable. Claire était certainement là à cause de sa lettre, sûrement pour lui passer un savon, mais la situation était trop cocasse pour qu'elle reste de marbre.

"Je suppose que tu veux prendre une douche ?" fit-elle, avant de repartir dans son rire.

Quelques minutes plus tard, Claire était propre, sous sa forme humanoïde, face à une boisson fraîche, assise devant Leyna.

"Bon ! Que fais-tu ici ? Je suppose que tu viens me savonner à cause de ce que je t'ai dit dans mon message ?"

Elle ne quittait pas son sourire insolent, la confiance brillant dans son regard.

Toujours un peu honteuse de s'être fait piégé ainsi, Claire observait Leyna... et ce qu'elle voyait briller dans le regard de son amie présageait une grande fatigue à venir et des problèmes à tout va pour l'Impératrice.

-" En effet. Je dois t'avouer que ta lettre ma fait énormément plaisir mais ... tu ne trouves pas que tout ça va un peu ... vite ?"

La nagaeru savait pertinemment qu'essayer de convaincre la tête de mule qui lui servait d'amie était peine perdue mais bon ... n'y avait-il pas un proverbe qui disait "qui ne tente rien n'a rien" ?

"Un peu vite ?! Tu plaisantes ?!"

Elle se leva. Elle avait encore du travail et, malgré la présence de sa chère amie, elle entreprit de laver le linge sale. Elle prit un savon et plongea les draps dans l'eau. Tout en frottant, elle continua sa discussion avec Claire.

"Ca fait 17 ans que la Résistance à été détruite ! 17 ans qu'Eléa a perdu la mémoire ! 17 ans qu'Alec est presque mort, ne pouvant se remettre de la perte de celle qu'il aime ! Et tu trouves que ça va vite ?"

Elle marqua une petite pause, adoucissant le ton.

"L'ennemi agrandit son armée de jour en jour, il faut rassembler les troupes de notre côté, sinon..."

Elle soupira. Elle posa le savon et, les bras mouillés et plein de mousse, se tourna vers son amie.

"Tu sais bien que je préfère mourir que de vivre avec pour empereur ce..."

Elle ne termina pas sa phrase, épargnant à l'Impératrice divers noms d'oiseau. Elle baissa le regard et reprit son travail.
A côté de la Résistance, il y avait aussi une part de ses pensées qui allait vers Arkam. Elle voulait retrouver celui qu'elle aimait tant 17 années auparavant. Et refonder la Résistance l'aiderait à le récupérer. Peut-être...

Claire fixait son verre. Bien évidemment 17 années cela pouvait paraître énorme mais sur une vie aussi longue que celle de la demi-alva, cela semblait insignifiant.

-" Tu sais pertinemment que je n'apprécie pas plus que toi de voir ce monstre à la tête d'un empire. Mais nous ne pouvons pas nous lancer tête baissée: j'ai un peuple à protéger et je ne peux me permettre aucun acte irréfléchi."

Les choses avaient changé depuis la rébellion, pour elle tout du moins. Elle n'était plus libre, les chaînes de sa fonction l'entravaient. Si elle commettait la moindre erreur ce sont des milliers de nagaerus qui en paieraient le prix.
Sa seule autre option serait d'abandonner le trône et de couper les ponts avec sa patrie d'adoption.

La semi-sen'yo termina de nettoyer le drap et entreprit de le rincer.

"Je ne t'ai pas demandé d'abandonner ton peuple pour me suivre."

Elle essora le linge et le déposa dans un grand panier, puis passa à un second drap.

"As-tu entendu parler de la Prophétie ?"

Elle s'arrêta un instant, étirant ses bras fourbus par le travail. Elle reprit ensuite sa tâche.

"Elle parle d'Eléa et Alec. J'en suis certaine. Et les réunir nous donnera des armes pour sauver Seleneï d'un tyran."

Elle rinça et essora le deuxième drap, avant de passer au troisième et dernier.

"Claire, tout ce que je pourrais te demander..."

Elle s'arrêta encore afin de faire face à son amie.
Une lueur douce, comme une requête, brillait dans son regard.

"C'est de ne pas me barrer la route. Je protègerai ma soeur. Je donnerai ma vie à ceux que j'aime alors... Laisse-moi faire, tu veux ? Je veux aider Eléa et Alec à être de nouveau heureux et permettre aux habitants de Seleneï de vivre libres."

Elle reprit son travail, essorant le dernier drap. Elle prit l'énorme panier et se rendit dans la cours où le soleil tapait fort, prêt à faire sécher le linge. Une corde attendait qu'on pende les draps sur elle, ce que Leyna entreprit de faire.

Claire resta seule dans la cuisine à contempler son verre. Elle hésitait. Dans son esprit, l'Impératrice essayait de dénouer un entrelacs de fils et de noeuds, elle essayait de déterminer laquelle des deux solutions qui se présentaient à elle était la meilleure.

D'un côté, elle pouvait accéder à la demande de Leyna: elle pouvait laisser son amie faire comme elle voulait et même, pourquoi pas, l'aider en mettant dans la balance du pouvoir sa propre puissance ainsi que son influence et le poids de l'Empire Nagaeru. Mais cela impliquait de combattre à nouveau et de se confronter à ses anciens démons.

De l'autre côté, elle pouvait s'interposer; refuser de laisser Leyna faire ce qu'elle voulait et même tenter de la stopper par la force s'il le fallait. Elle pouvait faire en sorte qu' Eléa ne puisse pas retrouver ses sentiments pour Alec ainsi que sa mémoire, elle pouvait prévenir le gouvernement Sen'yo que leur Reine était de nouveau rentrée en contact avec le Prince atalantea. Elle n'aurait aucun mal à les convaincre.

Mais voilà, elle ne savait que faire. Son coeur lui disait d'aider son amie, que Turambar était un tyran qui ne méritait que la mort comme châtiment et sa raison lui disait de ne pas agir sur un coup de tête, de ne pas engager tout un peuple qui avait confiance en elle dans une guerre. Elle n'avait que trop payé son impulsivité et son imprudence par le passé.

- Que dois-je faire ?

La jeune femme était perdue, elle était face à un choix cornélien. Pourtant, petit à petit une troisième solution faisait jours dans son esprit. Il suffisait de prouver que Turambar préparait une attaque ou une quelconque machination contre les Sen'yo, et alors l'Empire nagaeru pourrait s'immiscer ... Oui mais le problème c'est qu'elle ne savait rien des plans de l'Empereur. Le mieux était sans doute d'en parler à son conseil.

L'Impératrice se leva jetant un dernier regard sur la porte par laquelle son amie était sortie avant de sortir elle-même des cuisines. Elles devait encore retrouver sa petite compagne à fourrure.

[vers je sais pas]